Attendue par une bonne frange d’observateurs et d’acteurs politiques, le récent séjour des délégués du Conseil de Sécurité de l’ONU à Kinshasa a laissé plein de zones d’ombres et de déçus. Ainsi, le premier déçu est le pouvoir qui attendait un chèque en blanc et s’est vu rappeler le devoir de consensus autour de la machine à voter, de crédibilité et d’apaisement du processus, une demande internationale aux antipodes de plusieurs aspects du processus en cours. En face, la société civile ne comprends pas comment cette délégation n’a même pas mis les pieds à Beni où les opérations conjointes FARDC-MONUSCO sont dans un échec manifeste, où la population attendait avancer des propositions concrètes pour mettre fin aux atrocités.
« Nous pensons qu’il faut un consensus autour de la machine à voter, ceci est le point de vue de tous les membres, et nous continuons à confirmer la disponibilité de notre appui logistique », a révélé l’ambassadeur français à l’ONU, monsieur LACROIX, lequel a aussi insisté sur la nécessité de la crédibilité et du climat apaisé pour les futures élections.
« Il n’ont plus parlé d’inclusivité et de la décrispation », ont tout de suite réagi une frange d’observateurs.
Cependant, pour d’autres, tels que le cadre de l’AR Evariste LICHOMOYA, candidat député provincial à Beni ville: « La crédibilité passe nécessairement par le respecte de l’Accord de la Saint Sylvestre qui consacre l’inclusivité et la décrispation politique. Ceci va également dans le sens de la Résolution 2409 qui octroie à la MONUSCO la triple mission de protection des civils, d’appui au processus électoral et de suivi des droits humains. En réalité le refus de l’appui logistique et le blocage des opérations de la MONUSCO sont contraires à cette Résolution » .
Au sein de la Majorité, par contre, on estime que tout va bien, que le processus est crédible et qu’il n’est pas question de recevoir un soutien extérieur pour l’organisation des prochaines élections.
Dans ce tableau, les plus gros regrets sont ceux des femmes de la zone martyre de Beni qui estiment, à travers une mère de famille victime, fonctionnaire de son état, qui a perdu à la fois son fils, sa fille et son gendre dans les tueries du 22 septembre à Beni: « Il est incompréhensible que la délégation du Conseil de Sécurité, dont les Résolutions ne sont pas appliquées correctement, se limite à Kinshasa, ne vienne pas nous écouter et n’annonce rien de concret sur comment ramener la Paix chez-nous! »
« En vérité, la mission semble avoir été ultra diplomatique, et il ne fallait pas s’attendre à plus de la part d’une mission d’une Conseil de Sécurité miné par des divisions », a pour sa part fait observer un expert en droit international qui a requis l’anonymat.
Pourtant, même s’il y a des déçu dans tous les camps, un constat s’impose: l’ONU, avec une main de fer cachée dans des gants de velours, maintien la pression sur le pouvoir pour que les élections du 23 décembre ne mènent pas la pays et la région vers l’instabilité.
Cependant, pour sa part, Kinshasa ne semble pas prêt à céder.
En définitive, avant comme après la dernière visite du Conseil de Sécurité, l’horizon du processus est toujours masqué par des nuages lourdement chargés d’incertitudes.
ABRAHAM MUSITSHI